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30 octobre 2013 3 30 /10 /octobre /2013 22:19

 

Ce matin, j’ai trouvé un smartphone dans le bus, je l’ai gardé. Je suis bien trop curieuse pour le rendre. Il me faut regarder tout ce qu’il contient.

 

Je suis comme cela et l’assume entièrement.

Avant de l’allumer, je me fais déjà mon film, je cherche à qui il peut appartenir. Quelle tranche d’âge ? Pas facile car aujourd’hui tout le monde a un portable, cela va du petit adolescent à la personne âgée.

Moi, je suis au milieu, j’ai 40 ans et suis passionnée par l’informatique… Cette découverte tombe à pic !

 

Mon premier geste en rentrant à la maison est de m’assurer que personne n’est rentré, il faut bien sûr que je sois seule pour disséquer l’objet de ma convoitise. Je m’assieds confortablement sur le canapé et sors frénétiquement le téléphone de ma poche.

 

C’est un Iphone dernière génération. Le panel pouvant posséder un modèle comme celui-ci se réduit donc.

A priori, le propriétaire serait âgé de 20 à 50 ans et je suis certaine d’une chose : c’est un homme.

 

Comment l’ai-je deviné ? Allez… je l’avoue… j’ai beau être fine observatrice, deviner cela n’était absolument pas compliqué : la coque dudit Iphone montre des dessins de voitures Formule 1.

D’accord… c’est facile…

 

Les possesseurs d’Iphone ne sont pas, en règle générale, des hommes d’affaire, eux préfèrent une autre technologie à double consonance…

 

Je commence mon exploration et l’allume comme s’il m’appartenait. Vous noterez que, à aucun moment, une once de gêne ou de honte ne parvient à me faire abandonner mon investigation !

 

Je n’en reviens pas : aucun code n’a été programmé, j’ai accès au contenu intégral de cet appareil…

Comme je suis joyeuse ! Pourvu que personne n’arrive à cet instant où mon excitation est à son comble.

Deux messages sont arrivés, l’un provient de Marc et l’autre de Marion.

C’est fait, je rentre dans la vie de mon inconnu par effraction, je jubile, mon cœur s’emballe.

Je m’attèle à lire ces messages. Marc dit qu’il pense à lui. Tiens ! Que lui arrive t-il, a-t-il un problème actuellement ? Soudain, un petit tressaillement de remords s’empare de moi. Rien de grave, ne vous inquiétez pas ! Très vite, mon indiscrétion reprend le dessus sans regret.

 

Que vais-je regarder maintenant ? Les photos bien sur, je saurai très rapidement beaucoup de choses sur lui.

D’un autre côté, j’ai envie de faire durer le plaisir et mon ardeur, je vais donc lire quelques textos.

 

Différents noms apparaissent, je laisse défiler et pointe mon doigt sur l’écran tactile pour ouvrir les messages d’un certain Diego. Alors… qui est ce Diego ? Le dernier message date de deux semaines, ce n’est donc pas quelqu’un qu’il voit ou avec qui il entretient des relations régulières. D’ailleurs, il ne doit pas habiter Paris car le lieu de rendez-vous se situe à Barcelone au Café de l’Opéra sur la célèbre Rambla.

 

Mon anonyme était donc en voyage il y a une quinzaine de jours ; cela dit, nous étions nombreux en vacances vers le 25 aout. Je consulte les messages de façon chronologique.

 

Mon incursion m’emmène tout naturellement vers les messages de « Maman ». Eh oui ! nous avons tous dans notre messagerie des petits mots de notre maman qui nous disent… : « bonjour, prends soin de toi, je t’aime, bonne nuit, tu viens déjeuner dimanche ? »

 

Et là… maman n’a pas l’air très proche de fiston : les textos sont plutôt brefs, allant à l’essentiel : pas de petits mots doux. « Encore un mal aimé » me dis-je.

Quand, tout d’un coup, en remontant dans le temps, je tombe sur un sms très tendre de sa mère (Oh ce message remonte à 8 mois).

« Mon Martin, pardon de ma réaction lorsque tu m’as avoué ta situation, je n’ai pas réagi comme il se devait, moi ta maman.

Viens me voir ce soir à la fermeture de la boutique. »

 

De nouveaux éléments et de nouvelles interrogations, mon enquête avance.

 

Il se prénomme Martin, a des amis qui pensent à lui, une mère remplie de regrets, c’est un voyageur qui aime le soleil et surtout il a une situation compliquée…

Martin… quel âge peut avoir ce prénom ? Hum… je dirais entre 35 et 45 ans !

 

Tiens, un sms vient d’arriver, c’est encore Marion, que dit-elle ?

« Colomban n’est pas bien du tout, viens vite, je t’en prie, dépêche-toi, c’est la fin »

Oh non ! Peut être la vie de Colomban ne tient-elle qu’à un fil et il ne le sait pas, il ne le verra peut être plus. Moi, je sais qu’à cet instant quelqu’un a besoin de Martin et je gèle cette circulation d'informations. Comment faire ? A cet instant, je reconnais que je panique, je ne suis pas fière de moi. Dois-je répondre à ce texto ? Un autre arrive : c’est Ludovic qui s’excuse de le déranger pendant ses heures de cours mais qui veut s’enquérir de la santé de Colomban.

 

Un appel survient, la photo de Marion apparaît, jolie femme, la quarantaine.

Je refuse de répondre et laisse la messagerie prendre le relais.

 

C’est peut-être sa femme et Colomban son enfant… Je commence à me sentir mal… Il est 11H 30, les enfants vont bientôt rentrer déjeuner. Je ne suis plus la même.

J’ai envie de remonter le temps mais le sentiment de culpabilité devient de plus en plus fort, et, pour l’instant, j’ai peur de contacter Martin ou un de ses proches.

 

Je commence à fouiller dans ce portable, vers différentes applications concernant les loisirs, le cinéma, quelques jeux de lettres.

Je tapote sur le logo photo et m’embarque dans la galerie.

Je reconnais quelques endroits bien célèbres comme la Sagrada Familia, les côtes Varoises… Une série de portraits mais aucun enfant en vue.

 

Colomban ne serait donc pas un enfant…

 

Je vois une photo de Marion très souriante avec un jeune homme devant le Colisée. Un beau couple me dis-je. Subitement, je m’avise de regarder dans le répertoire… C… comme Colomban

 

Tiens ! L’homme ressemble étrangement à celui qui enlace Marion.

Le nom de famille est le même : ils sont donc mariés.

Je continue à consulter les photos, beaucoup de portraits de Colomban dont plusieurs en chambre stérile. Ah ! cette photo de Colomban tenant un autre homme par les épaules, ce serait peut être Martin ?

 

De plus en plus de photos de ces deux hommes, très proches l’un de l’autre, de plus en plus proches… Je comprends à l’instant que Colomban et Martin est le couple, Marion doit être la sœur de Colomban.

 

Colomban est en train de mourir et l’amour de sa vie n’est pas à ses côtés. C’en est trop.

 

Je me décide à répondre à Marion par sms en expliquant que je viens de trouver ce portable mais ne sais à qui le rendre. Je veux que tout aille vite, que Martin récupère vite son bien et qu’il aille le plus vite possible auprès de Colomban. Je demande si je peux faire quelque chose, elle me répond qu’il faut très vite contacter Martin car quelque chose de grave arrive.

 

Je comprends mais je dois faire celle qui ne comprend rien.

 

La clé dans la serrure m’indique que ma fille rentre pour déjeuner.

Elle est visiblement furieuse et de très mauvaise humeur. Je ne cache

pas le portable, elle le voit immédiatement.

 

« Maman, tu as acheté le dernier Iphone ? »

 

Ma réponse est brève, négative, s’en suivent des questions pertinentes. Très vite, son humeur rattrape ses interrogations, je lui demande alors la raison d’un tel état. Pourquoi est-elle si énervée, et contre qui ou quoi ?

Le téléphone se met à sonner, la photo de Marion apparait, je sursaute de peur je me précipite pour répondre.

 

« Bonjour, pouvez-vous venir au 12 rue Mouffetard maintenant s’il vous plait ? »

 

Je réponds par l’affirmative et réalise que nous habitons au 48, nous sommes donc voisins ou voisines, je ne sais pas qui je vais rencontrer… Serait-ce Marion ou Martin ?

 

Ma fille m’annonce qu’elle m’accompagne. Je lui explique en deux mots. Une fois arrivées, elle commence à me dire « Je suis très énervée car notre prof de français… » Quand à cet instant, un homme sort de l’immeuble, c’est Martin, en pleurs. Ma fille le reconnaît immédiatement puisqu’il est son… professeur de français, Monsieur Martin Boldec.

 

Il prend son portable, me remercie et se met à « fondre » dans mes bras. Ma fille ne comprend plus rien, elle pense que nous nous connaissons depuis longtemps, je la sens déstabilisée, fragile et singulièrement émue de voir son professeur répandre ses larmes sur mon épaule.

 

Elle a bien intégré qu’il ne pleure pas pour un portable perdu et perçoit à présent tout le mal-être et l’énervement de Martin lors de son cours du matin.

 

Il nous propose de monter prendre un verre mais je décline son offre, il s’excuse de faire connaissance ainsi et demande à ma fille de passer sous silence ce passage à vide mais qu’elle comprendra bientôt.

 

Pour ma part, tout s’entremêle, je ne sais plus qui est qui et ce qui se passe, le chagrin m’inonde petit à petit

 

Nous nous disons au revoir et revenons vers notre appartement.

 

Delphine, ma fille me demande ce qui se passe, je sens bien que du haut de ses dix-sept ans, tout est clair.

Elle me raconte donc sa matinée, moi la mienne, sans rentrer dans les détails.

 

Une dizaine de jours passent… Aujourd’hui Martin sonne à la porte, il vient s’excuser de son comportement, de son laisser-aller…

 

Et moi… qu’aurais-je dû dire ou faire ?

 

 

 

 

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commentaires

A
et voilà je pleure , on dit d'un homme qu'il perd de sa fierté quand il pleure , c'est faux , on peut être sensible à en pleurer, car la vie est dure, jusqu' à nous priver , à nous voler les gens que l'on aime, des blessures qui ne pourront jamais se refermer. merci j'ai adoré , pour info , écoute la chanson de ginette reno "ça pleure aussi un homme"
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G
Mais tu es un homme très sensible alain ... Je le sais !!! Un homme qui pleure est très attendrissant ! Je connais cette chanson en effet, elle est très belle !!!

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